Breaking Bad

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Le choc. J'ai longtemps reporté mon intérêt pour cette série. Tout d'abord, il faut bien reconnaître que le pitch de départ n'est pas très glorieux ni très engageant, d'autre part le fait qu'elle soit acclamée et couverte de louanges un peu partout n'aboutit généralement qu'à me rendre plus méfiant encore. Cet incroyable succès critique et public m'intriguait tout de même. C'est ainsi qu'après l'avoir longtemps différé, je me suis décidé à me plonger dans l'intégrale de Breaking Bad. Et depuis lors, le sentiment d'avoir visionné une oeuvre incontournable ne me quitte pas. Certes, la seule volonté qui consiste à vouloir parler d'un pareil monument génère inévitablement le sentiment que tout a surement déjà été dit, ailleurs, à un moment ou à un autre, et sous toutes les formes possibles. Comme à mon habitude, je parsèmerai mon analyse du sentiment de ressenti tout personnel qui m'habite. Car le rapport que l'on a avec cette oeuvre, plus que tout autre peut-être, touche à l'intime. L'enthousiasme qui m'a accompagné tout le long de ces cinq saisons est toujours présent en moi, et je me sens donc un peu obligé de le partager par ce biais.

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I. "La chimie, c'est l'étude de ce qui change " - Walter White.

Vince Gilligan, au centre, entouré d'Aaron Paul et de Brian Cranstom
Vince Gilligan, au centre, entouré d'Aaron Paul et de Brian Cranstom

Je suis passé à côté de cette série à l'époque où elle était à son apogée. Au final, je suis heureux d'avoir rattrapé ce retard, car je pense l'avoir fait de manière idéale. En effet, l'intégralité du temps de l'action prend part sur le courant d'une seule année, même si elle en a nécessité en réalité cinq pour le tournage. La visionner en intégralité en une fois permet donc de mieux apprécier la cohérence de l'oeuvre entière.

C'est en partie le nom de Vince Gilligan, le créateur de la série, qui m'a décidé à tenter ce visionnage. Avec ma mère, je n'ai pas pu m'en décrocher par la suite. Gilligan fait partie, à côté de Frank Sponitz, de Glen et Darin Morgan et de James Wong de la célèbre équipe de scénaristes qui fut révélée par Chris Carter sur X-Files. En tant que fan de la première heure, et considérant également cette série comme une des meilleures, il fallait donc obligatoirement que je m'y intéresse de plus près. A l'époque de X-Files, pour une des premières fois, il était possible de reconnaître la texture de chaque épisode en fonction de son scénariste. Chris Carter se réservait, quant à lui, les épisodes qui posaient les bases de sa mythologie. Les épisodes écrits par Gilligan sont depuis considérés comme classiques et incontournables. Au fil des ans, Gilligan a fini par être un des producteurs de X-Files, et y a même fait la connaissance de Brian Cranston sur l'épisode 2 de la saison 6 "Poursuite".  Je vais tenter de le démontrer : cette filiation avec X-files, si elle explique mon intérêt, éclaire également la trajectoire de la narration de Breaking Bad.

Une série crée par Vince Gillighan ne pouvait donc, sur le papier, que présenter des qualités d'écriture hors normes. Rien ne préparait pourtant à ce qui allait suivre. Alors que l'on aurait pu penser que Gilligan allait profiter de l'expérience acquise sur X-Files, je pense qu'il a en réalité eu l'intelligence subtile de s'inscrire en contrepoint avec l'oeuvre de Chris Carter, tant au niveau de la forme que sur celui du fond :  fable fantastique d'un côté, fable humaniste et réaliste de l'autre; complot gouvernemental mettant en jeu des organisations internationales contre intrigues sordides entre bandes de trafiquants divers, personnages profondément humain d'un côté contre personnalités hors normes ou extraterrestre, monstres intérieurs contre monstres au premier sens du terme.  Mais c'est surtout au niveau des trajectoires de l'écriture que se font les plus grosses différences. Dans X-files, les personnages, à l'exception notoire de Scully, connaissent une évolution minime, et mêmes les fans comme moi y trouvent là le point faible de la série. Lorsqu'à l'occasion j'évoque le sujet en parlant de telle ou telle autre série, j'ai baptisé cet aspect "le syndrome Chris Carter". Cela désigne selon moi le fait de ne pas savoir terminer son histoire en refermant l'ensemble de tous les axes narratifs. Au fil des saisons, Chris Carter n'a en effet eu de cesse d'ouvrir de nouvelles voies, encore et encore, comme autant de pistes qu'il n'a pas su ou pu refermer. En se complexifiant à l'extrême, la mythologie est devenue plus obscure que jamais. Le retour de la série ces dernières années, si elle a constitué un véritable évènement, s'explique aussi par le fait que toutes les réponses n'ont pas été apportées en leur temps. Ce sentiment de frustration perdure d'ailleurs toujours à l'heure où j'écris ces lignes.

Sur ce point également, Gilligan inscrit son oeuvre comme un parfait contrepoint : il y a un postulat de départ, un développement savamment construit et une conclusion exceptionnelle. Dans Breaking Bad, chacune des nombreuses pistes se referme en trouvant son accomplissement. Si je dois également baptiser ce principe, je le nomme "principe de la ricine". La petite fiole de produit ingénieusement cachée par Walt derrière une prise électrique est en effet un des exemple typique et emblématique selon moi de tous ces nombreux éléments disséminés et qui pourtant trouveront tous, sans exception aucune, leur accomplissement. Aucune des pistes, à ma connaissance, n'est oubliée ni laissée de côté dans le final grandiose de la série. La petite fiole de racine refait surface au moment idéal, et il fallait bien se souvenir d'elle. Le moindre détail est placé pour une raison précise. C'est par exemple la scène où Ted répond à la sonnette. Ce faisant, il se prend les pieds sur un tapis. J'ai cru tout d'abord à un petit accident lors du tournage, et dont la prise par manque de temps a été conservée. Il s'agit en réalité de ce qu'on appelle en terme technique un "implant", puisque quelques instant plus tard, Ted termine sa fuite en trébuchant lourdement sur ce même tapis, avec des conséquences tragiques. De la même façon, l'assiette que Walt casse malencontreusement lorsqu'il visite son prisonnier à la cave n'est pas une action gratuite. En reconstituant les morceaux à la façon d'un puzzle, Gilligan nous en apprends beaucoup sur la psychologie de son personnage, et cela permet également à Walt de deviner que son prisonnier en a gardé un morceaux pour s'en prendre à lui. Ces trouvailles autant visuelles que scénaristiques confèrent au génie, et je pourrais multiplier les exemples à foison.

Enfin, ce qui m'a frappé de manière constante dans Breaking Bad, c'est ce refus de l'équilibre, ce rejet systématique du statut quo. Lorsque l'intrigue trouve des caractères de stabilité, Gilligan s'empresse de bousculer l'ensemble en y injectant des évènements nouveaux, de donner un coup de pied pour recréer un état de déséquilibre contre lequel ses personnages doivent se battre. Mais il va plus loin encore, puisque ce faisant, la série devient une sorte d'énorme crescendo dans lesquels chaque changement provoque une évolution, qui a son tour sera soumise à un nouveau changement. Il n'y a aucune situation pérenne qui s'installe dans le temps, et le mouvement est perpétuel. Au centre, il y a le secret de la double vie de Walt. Au fur et à mesure de sa divulgation, la situation devient de plus en plus tendue et provoque l'évolution des personnages, du relationnel qu'ils entretiennent entre eux jusqu'au noeud de l'intrigue elle-même.

Concernant cette dernière, de Chris Carter pourtant, Gilligan va conserver la notion de mélange de genre dont je parlais plus haut. A l''instar d'X-Files qui alternait les genres, Breaking Bad propose en effet alternativement : comédie noire, thriller, drame intimiste et familial.

Eisenberg, l'alter-égo de Walter White
Eisenberg, l'alter-égo de Walter White

II. "Je me suis réveillé" - Walter White

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Breaking Bad fait partie de ces séries qui ont conservés leur titre original en France. Brian Cranston explique qu'il s'agit d'une expression originaire du sud de l'Amérique et qui signifierait : "s'éloigner du chemin qui était tracé et prendre de mauvaises décisions". Cela caractérise assez bien la trajectoire de Walter White. Rappelons brièvement ce Pitch de départ, tellement peu racoleur : A l'aube de la cinquantaine, Walter White, un modeste professeur de chimie d'Albuquerque, petite ville du Nouveau-Mexique, un peu effacé et brimé par la vie apprend qu'il est atteint d'un cancer du poumon inopérable. Il est obligé de cumuler un 2ème boulot afin de subvenir aux besoins de sa famille, sa femme Skyler qui a cessé de travailler car elle est enceinte et son fils Walt Junior handicapé. Pour ne pas les laisser dans le besoin après sa disparition, il se lance dans le trafic de méthamphétamine avec l'aide d'un de ses anciens élèves, Jesse Pinkman, devenu petit dealer de rues. Avec un postulat de départ si pessimiste et tellement peu attrayant sur le papier, Gilligan s'est d'abord vu fermer de nombreuses portes. Un peu comme le spectateur à qui on propose le pitch en l'état, et qui subodore la série déprimante et ennuyeuse à souhait. Comme je l'ai dit plus haut, un peu comme moi qui préférait regarder ailleurs en quête d'histoires plus distrayantes et optimistes.

Ceux qui me connaissent ou me suivent régulièrement le savent, j'ai une passion pour le jeu d'acteur de John Simm. Il a fallu très longtemps pour que je m'enthousiasme autant pour un autre acteur. Jusqu'à aujourd'hui. Par son extraordinaire composition, Brian Cramston tient véritablement la série sur ses épaules. Le personnage de Walter White, modeste professeur de chimie se transformant progressivement en baron de la drogue sous le pseudonyme d'Eisenberg est un modèle rare d'incarnation. Sur le plan théorique, j'ai beaucoup travaillé sur les techniques de jeu de l'acteur. Sans développer ici, j'ai défini à l'époque de mes études universitaires le principe d'incarnation comme celui dans lequel l'acteur, personne physique, s'efface complètement derrière son personnage, jusqu'à ne faire plus qu'un avec lui. Dans ce cas, il ne reste rien de l'acteur qui ne joue plus de rôle, puisqu'il est réellement son personnage. L'exemple contemporain le plus frappant demeure à mon sens celui de David Suchet qui est devenu Hercule Poirot à un point tel qu'il efface les interprétations qui l'ont précédés et même celles qui lui ont succédés. On peut parler du même phénomène pour Brian Cranston : a aucun moment l'acteur ne donne l'impression de jouer un rôle: il est véritablement son personnage à l'écran. Brian Cranston est également fascinant en terme de photogénie. Un peu comme Patrick Mc Goohan, pour qui cela reste flagrant aujourd'hui encore, chaque plan sur son visage, parfois très rapproché, chaque angle de caméra trouvé met en valeur l'expressivité, l'harmonie de ses traits. Les autres acteurs ne déméritent pas, et en particulier Aaron Paul dans le rôle de Jesse Pinkman, en qui Walt trouve un véritable fils de substitution. La scène du meurtre de Gale est peut-être celle, entre toutes, qui montre le plus l'étendue du talent d'Aaron Paul.

Modèle du genre, le scénario propose une morale douteuse, mais c'est justement la qualité de jeu d'acteur qui nous permet d'y adhérer sans réserve. Il n'est pas étonnant que Breaking Bad ait raflé tant de prix, tant les acteurs vont chercher leurs émotions au plus profond de leurs entrailles : 15 Emmy Awards dont 9 pour le jeu d'acteur, Brian Cranston en totalisant 4 pour lui tout seul. Je ne sais pas ailleurs, mais personnellement, chez moi, nous ne sommes pas parvenus à réellement détester Walter White, malgré tout ce qu'il a pu dire ou faire. Le jeu profondément humain de Brian Cranston nous a rendu ce personnage extrêmement proche, presque familier. Enfin, les questionnements dus aux situations détonnent : problèmes d'overdose, être dans l'obligation de tuer quelqu'un, devoir se débarrasser d'un corps à tout prix. Partant de là, ce phénomène d'empathie est renforcée par le fait que moi, nous en tant que spectateur, pouvons nous demander pour chacune de ces situations :"Qu'aurions nous fait à sa place?".

Si le scénario et l'interprétation sont hors normes en termes d'excellence, il fallait que je dise également un mot sur la réalisation: choix de plans audacieux, équilibrage entre scènes d'actions et scène intimiste familiales, photographie particulièrement soignée pour une série. Tout cela concourt à ce que l'on a l'impression d'assister véritablement à un film plutôt qu'à une série télévisée. Certains choix de mise en scène forcent le respect. C'est par exemple le cas ou Walt regarde un tableau sur le mur sur lequel un homme s'éloigne en barque du rivage où se trouve sa famille, comme une métaphore visuelle à sa propre situation. La scène où Jesse joue avec une sorte de scarabée montre également la générosité de coeur enfouie dans son personnage; un trait de caractère qui ne cessera d'évoluer ensuite. Ce sont des exemples parmi d'autres qui dénotent une mise en scène particulièrement travaillée dont l'ensemble produit une forme de narration purement visuelle. Certaines figures de style sont audacieuses, comme les séquences de la saison 2 avec le petit ourson rouge qui reprennent l'utilisation du noir et blanc avec touche de couleur introduit par Spielberg sur "La liste de Schindler". J'ai savouré les travellings audacieux, ces plans de caméra au plafond, et cette alternance entre plans macro et plans de pied, que l'on n'a pas si souvent coutume de voir à la télévision. Lorsque je pense à Walt sortant de son camping-car en slip, je me dis que même les frères Cohen n'auraient pas pu mieux faire.

Enfin, en tant que cinéaste, je suis rassuré de voir une série dans laquelle tous les plans sont soigneusement travaillés, ce qui tranche avec la tendance actuelle de caméra à l'épaule et de plans courts, voire ultra-courts, ciselés par un montage parfois trop rapide.

Walter White et Skiller

III. "La chimie, c'est la croissance, la transformation et la désintégration"- Walter White

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L'idée force de Gilligan, aussi originale qu'inédite, consiste à raconter la transformation d'un protagoniste en antagoniste. Le concept ne pouvait que me séduire dans la mesure où je suis depuis très longtemps fasciné par les perspectives qu'offrent cette idée. Comme une évidence, je suis modestement parvenu à donner vie à ce schéma en essayant de développer la notion fascinante pour moi de la figure de l'anti-héros.

Dans "La vie cinématographique de Michel Barbier", j'ai exploité à ma façon cette notion de double vie, où apparait une autre facette d'une existence qui serait rêvée, fantasmée. Ici, Walter White ne rêve pas sa double vie. Le personnage peut, à 50 ans, découvrir enfin qui il est et devenir ce qu'il aurait aimé être. Dans "Mon grand Frère", j'ai abordé à ma façon une autre sorte de double vie dans laquelle un personnage discret et effacé prends une sorte de revanche éclatante. Walter White est manifestement un personnage bridé et soumis autant sur le plan professionnel que sur le plan personnel, où d'ailleurs son épouse Skyler semble diriger le foyer au début de la série. Au fur et à mesure, il se révèle, se transforme et le rapport de force familial s'inverse progressivement jusqu'à ce que son double Heisenberg, nom inspiré par Werner Karl Heisenberg, physicien allemand et lauréat du prix Nobel de physique en 1932, prenne le dessus. Alors qu'on lui annonce l'issue fatale de son cancer, il peut en réalité commencer à vivre réellement et completement cette autre vie. Cet aspect résume à lui seul l'ensemble des aspect ambivalents et contradictoires de la série. La scène la plus poignante sera sa dernière entrevue avec Skyler, dans laquelle il lui avoue, ainsi qu'à lui-même et à nous tous par la même occasion, avoir commencé réellement à vivre durant cette dernière année.

"J’ai fait ça pour moi. J’aimais ça. J’étais doué pour ça. J’étais vivant"

Afin d'écrire cet article, j'ai cherché des éléments de comparaison, au cinéma comme à la télévision. des exemples de l'itinéraire d'un personnage qui évoluerai jusqu'à ce point. Je n'en ai toujours pas trouvé; pas dans ces proportions, pas de cette dimension, pas avec ce niveau de profondeur psychologique. Au cinéma, comme beaucoup, on pense au personnage de Michael Corleone dans la sage du Parain, mais il aura tout de même fallu à Coppola 3 films pour développer cette trajectoire. On pense également au personnage de Tony Montana dans Scarface de DePalma, toujours avec Al Pacino, mais certains passage sont trop rapides, trop abrupts dans l'évolution du personnage. Gilligan avoue qu'il s'agit de son film préféré, et ce n'est à mon avis pas une coincidence si deux acteurs du film jouent dans la série : Mark Margolis dans le rôle de Salamanca et Steven Bauer dans le rôle de Don Elagio . Enfin, Georges Lucas a proposé dans sa deuxième trilogie Star Wars un modèle fascinant de la transformation de Dark Vador. Mais même lui, il lui faut aussi 3 films pour raconter la genèse d'un des plus grands méchants du cinéma, et malgré cela, les transitions d'un état à un autre semblent quelquefois assez rapide.

Breaking Bad profite d'une large temporalité pour raconter la lente évolution de Walter White en Eisenberg. L'exemple qui me vient spontanément à l'esprit lorsque je parle de la temporalité de ce récit est l'épisode "La Mouche". Un huis-clos dans lequel pendant 45 minutes, la seule intrigue de l'épisode consiste en un combat entre Walt et une mouche. En réalité, Walt lutte contre un sentiment de culpabilité, notamment à l'égard de la mort de Jane la femme qu'aimait Jesse et que Walt a regardé mourir. Ce sentiment de culpabilité, Walt finira par l'écraser avec l'aide de Jesse sans avoir pu l'expurger complètement. D'une simple situation initiale banale en apparence, il est facile de pouvoir voir tout un tas d'éléments qui viennent éclaircir le rapport entre les deux protagonistes. Au-delà de l'exercice de style, l'épisode est à l'image de la série dans le sens qu'elle s'attarde à developer la psychologie de ses personnages. Chacun d'eux, à l'image de Walt, subit une transformation. Comme je l'ai expliqué plus haut, chaque situation, comme celle en apparence banale d'une lutte improbable et obsessionnelle avec une petite mouche est loin d'être gratuite.

Ce que j'ai expérimenté d'entrée, c'est que la série, qui parle d'addiction à une drogue dure, devient elle-même addictive. En allant plus loin, on peut déceler chez chaque protagoniste une sorte d'addiction : addiction au danger pour Walter, à la drogue pour Jesse, au bonheur pour Skyler, à la quête d'Eisenberg pour Hank. Cette mise en abime s'explique par la qualité d'écriture, d'interprétation et de réalisation qui fait qu'à côté de Walt, de Skyler, de Walt Junior et d'Holly, nous devenons nous même en tant que spectateur le cinquième membre de cette famille. Il est intéressant, enfin, de constater qu'à côté de l'évolution de Walter et de Jesse, tous les personnages, qui sont admirablement développés d'un point de vue scénaristique, connaissent une évolution sensible. J'ai personnellement, compte tenu de la fascination que j'ai pour les anti-héros dont j'ai parlé plus haut, été séduit par le personnage de Hank. Le beau-frère de Walt est la figure typique du véritable beauf américain, qui boit de la bière et fait le fanfaron lourdingue lors des repas familiaux. Sa double vie à lui est sur le plan professionnel, où il se révèle être un flic redoutable, dont l'obsession est d'appréhender Heisenberg. Ce véritable jeu du chat et de la souris est jubilatoire, car comment pourrait-il soupçonner que l'objet de son obsession est juste sous son nez.

Hank Scrader, le beau-frère de Walter, campé merveilleusement par Dean Norris
Hank Scrader, le beau-frère de Walter, campé merveilleusement par Dean Norris

Conclusion

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Il y aurait matière à écrire beaucoup plus sur Breaking Bad, tellement cette oeuvre se révèle riche et complexe. Peut-être devrai-je faire un nouvel article, puisqu'ils annoncent un film "El Camino" et que, depuis la fin, "Better caull Saul" basé sur le personnage de l'avocat Saul Goodman a vu le jour. Je n'aurai jamais cru pouvoir l'affirmer, mais Breaking Bad rentre dans mon Panthéon des meilleures séries. Certes, le Prisonner restera pour toujours, et pour de multiples raisons le premier de mon classement, mais tout de même. Le fait que j'ai partagé cette expérience de visionnage au côté de ma Maman, qui se bat contre une leucémie, renforce encore la proximité émotionnelle que j'entretiens avec cette série. Ces moments de partage, que l'on prenait soin de bien caler, me manquent, et en écrivant cela, je réalise que c'est Walter White qui me manque. Il nous manque à tous les deux. Lorsque j'ai expliqué à un ami qui me l'avait conseillé que je venais de commencer cette série, il m'a répondu plusieurs fois "Je t'envie". Je comprends aujourd'hui ce qu'il a voulu dire. C'est un peu le sentiment que l'on ressent lorsque l'on s'approche de la fin d'un livre, on souhaiterait prolonger encore un peu le plaisir. A l'heure actuelle, je n'ai retrouvé nulle part ailleurs ce plaisir sensoriel autant qu'intellectuel a suivre une telle histoire. Si nous avons tant aimé Walter White, c'est parce que nous sommes tous en réalité des personnages contradictoires, et que nous nous reconnaissons donc tous un peu en lui.

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