Come Home

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Dans ma vie personnelle, récemment, comme beaucoup, j’ai vécu une séparation difficile. J’ai subi une rupture que je ne souhaitais surtout pas. Ceux qui sont passé par ces douloureux moments le savent, c’est généralement celui qui choisit de rompre qui s’en tire, dit-on, le mieux. En analysant en profondeur les multiples et complexes rouages qui mènent à une séparation entre deux êtres qui s’aimaient au début jusqu’à fonder un foyer et avoir 3 enfants, la dernière production BBC « Come Home » vient bousculer toutes les idées reçues. La mini-série de Danny Brocklehurst montre ainsi que la souffrance existe de toute part : chez celui qui choisit de rompre comme chez celui qui reste seul, mais aussi chez ceux qui sont aussi, en quelque sorte, des victimes collatérales, les enfants.  

J’ai éprouvé de manière intense ces sentiments mêlés d’incompréhension, d’injustice, de révolte et finalement d’acceptation qui se retrouvent chez le protagoniste principal. Est-ce la raison pour laquelle j’ai été littéralement bouleversé par « Come Home » ? Je reconnais avoir transposé, malgré moi, certains épisodes de cette tragédie abordant la question de la rupture amoureuse avec ma propre histoire. Cependant, je veux croire que l’incroyable puissance émotionnelle de cette série trouve essentiellement son origine dans des qualités exceptionnelles d’écriture, de réalisation et d’interprétation. C’est tout l’objet de ce que je vais essayer ici de démontrer. 

I. Reviens à la maison

Greg s’occupe seul de ses trois enfants, Liam, Laura et Molly

Le pitch de cette mini-série en trois parties d’une heure réalisé par Danny Brocklehurst peut se résumer par la description d’une situation, plutôt qu’à une succession de péripéties convenues. Dès le départ, j’ai eu le sentiment étrange que j’aurai pu écrire ce scénario, terriblement d’actualité : modeste garagiste, Greg Farrel se retrouve seul pour élever ses 3 enfants, Laura, Liam et Molly. En effet, son épouse Marie a décidé d’abandonner le foyer familial et ses enfants après 19 ans de mariage. Désespéré, n’acceptant pas cette séparation dont il ne peut comprendre les véritables raisons, Greg cherche maladroitement à récupérer Marie. Dans la première partie, nous nous attachons à la souffrance psychologique de ce personnage, qui continue à vivre et à s’occuper seul de ses enfants tout en cherchant à comprendre les raisons qui ont poussés Marie à le quitter. Le titre « Come Home », qui peut se traduire par « Reviens à la maison » est clairement le cri du cœur poussé par Greg. 

Le spectateur masculin ne peut faire autrement que de prendre obligatoirement fait et cause pour ce personnage profondément humain. La sensibilité du jeu de Christopher Eccleston est parfaitement mis au service de ce père de famille en proie à une douleur qui fait écho à ce que l’un ou l’autre d’entre nous a pu vivre dans une rupture. Comme nous l’avons dit, cette souffrance est celle du côté qui subit le choix de l’autre, et qui peut-être souffre le plus. Mais l’écriture de cette série se veut plus riche et beaucoup plus subtile qu’elle ne le laisse paraitre. En effet, si l’exposition de la situation est terriblement manichéenne en nous proposant d’emblée de nous attacher au personnage de Greg, la suite montre que celui qui prend la décision de la rupture, en l’occurrence Marie, peut également en souffrir. Le réalisateur rétablit un certain équilibre des points de vue, en touchant à la dimension tabou de la mère de famille jugée par la société pour avoir abandonné le domicile conjugal, et surtout ses enfants. Cette dimension est au cœur de l’écriture Danny Brocklehurst. Il déclare ainsi : «Je suis devenu fasciné par le tabou de la mère qui partait. Quand ce sont les pères qui partent, la société l’accepte et considère cela normal. Lorsque ce sont les mères qui partent, elles sont condamnées. Cela m’a semblé un territoire riche à explorer d’un point de vue théâtral, et une façon d’explorer la parentalité. »

Dès l’épisode 2 en effet, nous pouvons constater que rarement une œuvre aura fouillé autant dans la psychologie de ses personnages. Marie parle certainement davantage au public féminin, mais son cheminement de vie ne laisse personne indifférent pour autant. Le choix d’abandonner ses enfants se révèle plus difficile que prévu. Elle devra affronter le regard des autres, qui juge sévèrement son choix. Son personnage traduit une vérité trop souvent caché et tabou dans nos sociétés modernes : celle des femmes pris au piège dans un véritable carcan familial, qui les placent plus ou moins de force dans une position de mère au foyer, véritable esclaves ménagères. Si la morale voudrait que l’on condamne facilement ses tentatives d’évasion, par le biais de liaisons extra-conjugales dont les conséquences peuvent être tragiques, la série nous fournit l’occasion unique d’approcher et de comprendre les sentiments qui l’ont poussés à ces extrémités. 

Enfin, la troisième partie propose un dénouement possible entre ces deux personnage en souffrance. La confrontation finale révèle tout le sens et le propos de la série. L’œuvre entière nous propose en effet une sorte d’autopsie du couple, dont la douleur est palpable et communicative. Chacun fera un pas vers l’autre, mais aussi un pas vers la vérité de ses sentiments, en abattant les masques. Le final est âpre, reconnaissons-le, et ne laisse pas le spectateur indemne. J’y vois une leçon de vie, en creux, dans la mesure où chacun, après avoir vu cette série, tirera ses propres leçons du couple et de la famille. 

Tout au long de son histoire, le cinéma, par le biais des comédies sentimentales, érigés en genre, s’est fait une spécialité d’étudier la naissance du sentiment amoureux. « Come Home » prends le contrepied de cette thématique en proposant, par une figure de style comparable ainsi à une sorte d’inversion du relief, d’exploiter la fin d’une histoire. S’il est coutume de dire qu’en Amour, 1+1 est égale à 1, ici en revanche, Danny Brocklehurst propose d’examiner une nouvelle équation, que l’on pourrait facilement traduire par la façon dont 1 est égale à 2. De la même façon, beaucoup se sont penchés sur les divers cheminements qui conduisent de manière inexorable à la fin d’un couple, sur le phénomène d’usure mortifère des sentiments et sur les conséquences épouvantables de l’épreuve du temps. Je pense ici au fabuleux film de Sam Mendes, que je cite régulièrement, « Les Noces Barbares ». « Come Home » vient apporter une forme narrative encore inexploitée à cette thématique. En effet, le coup de génie de cette série consiste, comme je l’ai dit plus haut, à proposer le point de vue successif des deux principaux protagonistes, afin de mieux marquer leur différence et leurs incompréhension mutuelle. L’application de ce principe est tellement efficace, que je pense que même si un spectateur faisait le choix de débuter cette histoire directement par le 2ème épisode, la compréhension du récit dans son esprit prendrait un sens différent et détourné mais aboutirait au final à la même conclusion. Avec « Come Home », Danny Brocklehurst aborde de front une thématique difficile et encore un peu tabou : celle d’une femme, une mère qui abandonne son mari et ses enfants. 

Paula Malcolmson incarne avec beucoup de force Marie

II. Une histoire racontée selon deux points de vue

Anthony Boyle et Christopher Eccleston : Liam et Greg

Si cette série a d’abord suscitée mon attention, c’est parce que j’ai eu envie de retrouver Christopher Eccleston. Il arrive quelquefois que ma passion théâtrale reprenne, de façon inexorable, le dessus, et que je sois irrésistiblement attiré par une performance en terme d’« Acting ». C’est la raison pour laquelle je parle régulièrement ici dans le cadre de ce blog de John Sims ou de Suranne Jones, des comédiens dont la puissance de Jeu m’impressionne. Tous les deux m’inspirent au plus haut point. Christopher Eccleston fait également partie de ce petit cercle fermé d’acteurs dont chaque prestation me procure une sorte de jouissance intérieure. L’acteur, qui est mondialement connu pour son rôle emblématique dans « Docteur Who », série dans laquelle s’est d’ailleurs également illustré John Sims, m’a personnellement enthousiasmé dans « The Left Towers ». Je le dis souvent aux personnes auxquelles je conseille cette série : le 3ème épisode a constitué ma porte d’entrée à cet univers baroque, iconoclaste et hors norme, grâce à son interprétation que je qualifie d’exceptionnelle.

Pourtant, à l’instar de John Sims, Christopher Eccleston parvient ici à nous surprendre en incarnant à la perfection un personnage dont la caractéristique principale tend vers une certaine forme de normalité. Le côté exubérant et tonitruant qui colle si bien à ce comédien généralement et qui ont été si brillamment exploités dans sa carrière, a été mis ici de côté, et l’acteur nous régale avec cette composition originale d’un homme ordinaire, auquel il prête admirablement une sensibilité à fleur de peau. La séquence durant laquelle il rencontre des jeunes femmes par l’entremise d’applications « Tinder » procure une pause humoristique bienvenue. La drôlerie du moment où il fait tomber un préservatif par inadvertance devant l’une de ses rencontres, avant qu’elle ne parte en lui déclarant « qu’il n’en aurait pas besoin » est tempérée par le sentiment de gêne que la situation et l’acteur parviennent à nous faire ressentir.

La grande originalité du récit, ce qui fait en réalité sa redoutable force, est qu’il ne se contente pas de présenter une vision manichéenne. C’est une analyse très méticuleuse des rouages psychologiques des personnages qui nous est présenté ici. Comme dans la réalité, chaque élément qui a amené à cet état de fait est extrêmement complexe et provient très souvent d’un profond sentiment d’incompréhension mutuel. Dès le deuxième épisode, le réalisateur nous invite ainsi à nous plonger dans la psychologie complexe du personnage de Marie, en proposant une approche courageuse et résolument moderne de son personnage. Marie est une épouse dont les 19 ans de mariage ont fini par user les sentiments : aime-t-elle encore Greg ? Est-elle encore attachée à ses enfants ? Les principales problématiques auxquelles la série nous invite à réfléchir sont ici progressivement amenées : 

  • De quelle manière deux personnes qui s’aiment profondément peuvent-elles devenir tellement différente qu’elles en deviennent même opposées ?
  • Comment un enfant peut-il réussir à pardonner à sa mère de l’avoir abandonné ?
  • Qu’est-ce qui a réellement poussé Marie à partir et pourquoi est-elle parvenue à cette décision radicale, qui transforme pour toujours l’existence de tous ?
  • Comment faire accepter aux enfants qu’un des parents puisse refaire sa vie, et amène le nouvel arrivant au domicile ?

Danny Brocklehurst tient le spectateur constamment en haleine, en usant de formes stylistiques empruntées au polar : il a ainsi recours à des flash-backs et multiplie les points de vue qui apparaissent comme autant de rebondissements. Il construit ainsi sa narration comme un film policier, où le spectateur lui-même doit recueillir chaque indice, et est tenu en éveil par de nombreux rebondissements. Cette approche est mise en place dès la séquence d’introduction, dans laquelle Greg s’introduit par effraction dans la demeure où s’est réfugiée Marie. Profitant de son absence, il décide de fouiller les lieux dans l’espoir de trouver quelques traces ou indices divers qui lui permettraient de comprendre la décision brutale de sa femme. Marie rentre au domicile plus tôt que prévue et Greg doit absolument se cacher. Le réalisateur décide de laisser alors cette situation de suspens en l’état, pour débuter véritablement son récit quelques mois plus tôt par l’entremise d’un flash-back. D’un point de vue formel, à l’image de cette introduction, les nombreux rebondissements sont exacerbés par des cadrages très proches des corps. Cette proximité visuelle renforce la proximité situationnelle générale, où chaque spectateur est amené à se retrouver dans l’un ou l’autre des deux protagonistes. Si le public masculin peut se retrouver irrésistiblement à un moment ou à un autre dans les souffrances et les interrogations de Greg, je pense que les doutes, les interrogations, les errements et les remises en questions de Marie trouvent de nombreux échos chez les spectatrices. Je pense même que l’histoire est tellement bouleversante qu’elle peut parvenir à diviser les spectateurs en couple, en fonction de leurs sexe. 

Marie est sa mère

III. Nous avons tous les deux perdus

Réussir le final d’une série traitant aussi bien d’une telle thématique est en soi une gageure. En effet, il fallait trouver un point d’orgue suffisamment élevé pour que la série ne retombe pas comme un soufflé. Comme je l’ai affirmé plus haut, la série révèle et sublime ses intentions avec sa conclusion. Danny Brocklehurst choisit donc de terminer sa série dans un 3ème épisode, sacrifiant à mon avis, certaines boucles narratives de ses personnages. Personnellement, la conclusion est un aspect que j’examine toujours de manière scrupuleuse afin d’estimer la pertinence d’un scénario : les trames scénaristiques ouvertes qui se doivent d’être correctement bouclées, les arcs narratifs des personnages qui se doivent d’être achevés. Dans le cas de « Come Home », je pense que la thématique des violences conjugales instauré à travers le personnage de Brenna aurait peut-être mérité d’être plus amplement exploité. Malgré l’agression qu’il commet sur Paula, la fille ainé de Greg, le mari de Brenna était-il aussi violent ou bien a-t-il été piégé dans un engrenage semblable à celui de Greg ? La réponse qu’il aurait pu trouver face à une situation de rupture qu’ici aussi il n’accepte pas pourrait se traduire alors par la violence. Un autre exemple des thématiques proposées par la série est certainement celle liée aux enfants, qui apparaissent nous l’avons dit comme des victimes collatérales de la situation. Cela est d’autant plus vrai à partir du moment où Marie fait volte-face en choisissant d’en demander la garde. Il est à noter, également, une certaine critique du rôle de la justice, qui applique aveuglément les Lois qui conservent à la mère l’intégralité de la garde. La mise en scène montre bien l’injustice que cette application aveugle peut entraîner. 

Au-delà de cet aspect, Laura, Liam et Molly forment à mon avis à eux trois un éventail des réactions existantes. 

Liam, interprété par l’excellent Anthony Boyle, est presqu’indépendant. Il travaille au garage de son père et parait le soutenir au début car il ne peut pardonner à sa mère d’avoir abandonné le foyer familial. Il finira par se détacher de son père, qui refait sa vie peut-etre trop rapidement, pour affirmer une certane forme de dépendance.

Laura est très partagé. Elle vit mal l’arrivée de Brenna, le fait que son père puisse refaire sa vie. Lorsque le mari de Brenna s’en prendra par mégarde à elle, elle se tourne du côté de Marie. Cette bascule est le point de départ de la démarche de Marie pour la garde de ses enfants. 

Molly est la plus jeune. C’est par son intermédiaire que nous nous prenons de sympathie pour Greg, qui fait de son mieux pour s’en occuper. La séquence dans laquelle Marie vient discrètement l’observer à travers une vitre avant que Molly ne s’ aperçoive de sa présence est très difficile et  montre bien l’extrême complexité des sentiments. 

Malgré l’existence de ces possibilité dramatiques, Danny Brocklehurst choisis délibérément d’écarter toute piste qui aurait pu amener des épisodes supplémentaires, et conserve un format compact en trois parties. La forme stylistique s’apparente à une dissertation : 

  1. Thèse : la première partie s’attarde sur Greg, qui n’accepte pas la décision de Marie parce qu’il ne la comprends pas, et qui tente courageusement d’élever ses 3 enfants tout en essayant de refaire sa vie. Ses déboires avec les rencontres « Tinder » sont touchants, on l’a dit, mais c’est surtout la naissance de son histoire avec Brenna, qui tient un camion ambulant de restauration rapide, qui en font un personnage humain et émouvant. Cousue de fil blanc au début, leur histoire est amenée avec beaucoup de pudeur. Greg a recueilli la jeune femme et son fils chez lui, pour les protéger d’un mari violent, ils ont bu tous les deux et leurs confidences respective les rapprochent inexorablement. 
  2. Antthèse : Marie est présenté de façon courageuse comme une victime. Pris au piège d’une place et d’un rôle au sein de la famille qui éteignent sa personnalité, elle n’a pas vraiment d’autres échappatoire que la fuite. Elle est incomprise par son entourage, y compris sa propre mère, et ses nombreuses failles sont présentées comme autant de manifestation de cette incompréhension. Cela s’illustre particulièrement lorsqu’elle se décide à revoir son ancien amant, pour lui révéler qu’il est en réalité le père de Laura. Elle confronte alors sa vision du monde à la réalité, qui lui dit qu’à la lumière du temps qui s’est écoulé, les choses ne sont pas telles qu’elle l’avait espéré. Si je loue l’interprétation de Christopher Eccleston, Paula Malcolmson interprète Marie avec énormément de conviction et réussit à faire d’elle un personnage émotionnellement très fort.
  3. Synthèse : Afin de conclure sa série de manière la plus brillante qui soit, Danny Brocklehurst fait le pari terriblement audacieux de placer le spectateur à la place du juge qui au final devra rendre sa décision sur la garde des enfants. Après avoir alterné les points de vues, donné à voir des perspectives différentes et conduit ainsi le spectateur à revoir constamment sa position et à douter, il est presque devenu impossible de prendre parti pour l’un ou l’autre des camps. 

A mes yeux, cette conclusion constitue un moment d’exception. L’ensemble Thèse, Antithèse et Synthèse prend tout son sens. Si la thèse nous a fait prendre fait et cause pour Greg, en père émouvant, touchant et profondément humain, victime de la situation. L’antithèse nous révèle une Marie en tant que victime qui manifeste son réveil au travers de cet abandon. Au final, elle aime ses enfants, jusqu’à vouloir entreprendre une action en justice pour les récupérer. Par ses yeux, nous entrevoyons un autre aspect de ce mariage : Greg voulait qu’elle remplace sa propre mère au foyer, en faisant d’elle une sorte d’esclave. Il lui a menti en simulant une vasectomie pour la forcer à avoir un nouvel enfant. Cela l’a conduit à une sorte de désespoir qu’elle a gardé en elle, et qui l’a même conduite à avoir une relation extra-conjugale. De cette liaison est certainement née sa fille Laura. 

Cette synthèse doit absolument voir les masques tomber. Il y a tout d’abord le procès, moment épique où les doutes et les certitudes vacillent constamment, surtout du côté de Marie qui trouve en sa propre mère une sorte de conscience morale.

La séquence de la médiation entre Greg et Marie est un grand moment d’intensité, révélateur des conflits sous-jacents. Lorsqu’ils doivent signer le document divisant leurs actifs, la conversation révèle l’étendue de ce qui les sépare. Greg insiste pour que Marie le lise en entier. Celle-ci lui réplique doucement : « Tu ne peux plus me dire quoi faire, Greg ». Celui-ci, un peu remonté, quitte la séance en lui reprochant de s’être éloigné de la famille de façon inexplicable. Alors, tout aussi calmement, Marie dit au médiateur : « Il y avait des raisons. »

Cependant, la véritable conclusion qui verra la confrontation finale entre Greg et Marie se fait dans l’antichambre du tribunal, à l’abri des regards. Malgré sa victoire, Marie doit encore avouer à Greg la paternité de Laura. En proposant une solution de partage raisonnable, elle restitue à Greg son rôle de père et de mari aimant. De manière très émouvante, ils se remémorent tous les deux leur vie de famille passé et constatent les ruines de leurs mariage. Dans un montage parallèle où il nous est donné à voir les images touchantes des moments heureux, notamment celles qui correspondents au bonheur de leur mariage, ils en conviendront « Nous avons tous les deux perdus ». 

Danny Brocklehurst 

Conclusion

Danny Brocklehurst propose avec « Come Home” une nouvelle forme de mélodrame, un genre dont certains pouvaient à tort croire qu’il n’avait plus rien d’intéressant ni d’innovant à raconter. En proposant une nouvelle approche, autant sur la forme que sur le fond, Danny Brocklehurst propose une histoire dense et profonde dont on ne sort pas indemne. Sur le fond, parce qu’en approfondissant les fêlures respectives de ses deux protagonistes, le réalisateur prend le spectateur à partie à chaque minute. Il balaie les figures stéréotypées qui sacrifient au manichéisme en faveur d’une audace psychologique qui décortique chaque personnage jusque dans ses recoins les plus inavouables. Sur la forme, parce qu’il y a aussi de l’audace à montrer successivement les parcours et à remettre ainsi en cause les idées reçues qu’on pensait indéboulonnables aux premiers abords. Il s’appuie pour cela sur ses deux interprètes, époustouflants : Christopher Eccleston et Paula Malcolmson. Enfin, le final révèle une écriture d’une intelligence rare et d’une pudeur extrême. 

« Come Home » nous enseigne de quelle façon une relation peut être perçue et vécue différemment par chacune des deux personnes, tout en déconstruisant une certaine vision de la parentalité moderne. Rarement, une réflexion sur les déchirements d’un couple aura constitué à mes yeux une démonstration aussi subtile et complexe. En creux, je l’ai dit, il constitue un enseignement inédit sur les ambitions que chacun doit porter à sa propre vie sentimentale. 

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