Depuis tout petit, il y a un super-héros que je chéri entre tous : l'original Captain Marvel, dont les publications affichent aussi en gros le titre de "Shazam!" Ce soir, j'ai donc vu un objet chéri de mon enfance prendre vie sur grand écran. "Enfin!", ai-je aussi envie de dire, car j'ai suivi le projet depuis son origine, du moment où jaillirent les premières rumeurs de tournage du film jusqu'aux premières idées de casting. Il faut dire qu'ils sont allés le chercher loin ce Captain Marvel, car je persiste à l'appeler ici par son nom véritable. D'aussi loin que je me rappelle, lors de mes premières lectures de Comics, il y a tout de suite eu un Super-Héros que je préférais entre tous. Parce qu'il était différent, parce qu'il avait son univers bien à lui, décalé et bigarré, peut-être aussi parce qu'il suscitait en moi un vague sentiment de transposition. Il faut dire que l'enfant que j'étais alors adorait penser qu'il suffisait d'un mot magique pour se transformer en "Plus puissant mortel de la Terre". Depuis sa sortie sur les écrans français ce 4 avril 2019, le film divise la critique et, dans une certaine mesure aussi, les spectateurs. Une division dans son appréciation qui se trouve amplifiée par le fait qu'il soit un succès critique et public incontesté aux Etats-Unis, qui vont même jusqu'à parler de Renaissance du DC Universe, voire du meilleur film de l'univers DC. Mon interêt d'adorateur de l'oeuvre originelle se trouvait amplifié par cette bataille critique. Je suis arrivé enfin dans la salle avec beaucoup d'appréhension : qu'avait-ils donc fait du héros de mon enfance ? Déjà, après avoir vu la bande-annonce, j'avais émis des réserves au sujet du casting des acteurs principaux. Tout cet humour potache dilué dans ces premières images m'ont fait redouter le pire, une réécriture actuelle en totale opposition avec ce qu'était l'essence du personnage. Comme je l'expliquais à ceux qui m'en entretenaient, la question qui se pose ici est la suivante : comment adapter un personnage aussi décalé dont l'ennemi principal se trouve être un minuscule vers de terre extraterrestre qui parle affublé d'un chapeau melon ?
I. L'Original Captain Marvel
Mon histoire avec cet héros atypique commence avec mes premières lectures de comics. "L'original Captain Marvel". Je ne comprenais pas alors le sens de ce mot : "original". A mes yeux, cela ne pouvait que renvoyer obligatoirement au caractère excentrique et extravagant du personnage. Et c'est vrai que ce Captain Marvel était différent de tout ce qui existait ailleurs. Il n'avait pas peur d'être ridicule, gauche ou maladroit. Pour ceux qui ne le connaitrait pas, rappelons brièvement le Pitch, repris assez fidèlement par le film : un jeune orphelin, Billy Batson, qui travaille comme reporter radio, se retrouve un jour dans un tunnel de métro abandonné, dans lequel il rencontre un sorcier de plus de 5000 ans, Shazam. Trop âgé pour continuer sa lutte contre le mal, ce dernier désigne Billy pour lui succéder. A partir de ce moment, en prononçant le nom du vieux sorcier, Billy se transforme en adulte doté de super pouvoirs et devient, selon la phrase légendaire de Lex Luthor, le "plus puissant mortel du monde". Shazam est un acronyme, constitué par l'initiale des dieux de la Grèce antique, auquel il emprunte sa qualité majeure : la sagesse de Salomon, la force d'Hercule, l'endurance d'Atlas, la foudre de Zeus, le courage d'Achille et la vitesse de Mercure.
Mais l'humour de ses aventures, je ne le savais pas alors, correspond à ce qu'il est coutume d'appeler aujourd'hui l'humour Camp. Sans aborder la question de l'iconographie Gay du style camp, j'utilise toujours cette notion selon l'acceptation qu'en donne le critique américain Ronny Chester. Ce dernier propose une définition claire de cette forme d'humour typiquement américaine connue sous le nom de "camp" : "un ton naïf et solennel associé à des situations délirantes et/ou puériles, le tout illustré par un style guilleret, baroque et théâtral. Un mélange d'ironie et d'autodérision festive qui touche tous les secteurs de la fiction à l'exception des personnages qui se prennent, eux, totalement au sérieux."
Lorsque j'explique ce genre d'humour auquel j'ai toujours été très sensible, le meilleur exemple qui me vient à l'esprit est celui du Batman d'Adam West. Il faut oublier le retour à la noirceur originelle du personnage, magnifié par Christopher Nolan, ces dernières années, pour se souvenir du chef d'oeuvre que constitua cette série, à laquelle toutes les stars de Hollywood se pressaient de participer. Dès lors, comment transposer cette forme d'humour dans l'adaptation de Captain Marvel ?
Mais au delà de la question de l'humour du personnage, le terme "original" renvoie à quelque chose d'autre, que je ne perçut que bien plus tard. En effet, Captain Marvel appartient à la famille DC. Or, chez Marvel, il existe également un Captain Marvel qui fait beaucoup parler de lui. En outre, la confusion est telle que lorsque j'ai fais la connaissance du Captain Marvel de chez Marvel, celui-ci en était à sa période Rick Jones, le premier partenaire historique de l'incroyable Hulk. Pour être clair, à cette époque, Captain Marvel est banni dans la zone neutre, un peu comparable à la zone fantôme dans laquelle est banni le général Zod par Superman, et entretient une liaison télépathique avec le jeune Rick Jones. En faisant se choquer les deux bracelets qu'il porte à ses poignées, Rick permute ses atomes avec Captain Marvel qui peut vaquer à ses actions super héroïques sur Terre. Ainsi, il s'agit dans les deux cas de l'histoire d'un adolescent qui se transforme en un adulte doté de super pouvoirs, l'un a l'aide d'un mot magique et l'autre à l'aide de bracelets. La seule différence est que dans un cas il s'agit de deux personnes différentes, alors que dans l'autre il s'agit de la même personne.
Les deux Captain Marvel symbolisent mieux que tout autre la rivalité entre Marvel et DC, surtout que les adaptations cinématographiques des deux super-héros sortent avec un petit mois d'écart : Brie Larson incarne la dernière déclinaison féminine du personnage chez Marvel dans "Captain Marvel" avant que Zachary Levy n'incarne le plus puissant mortel du monde dans "Shazam!" L'acteur Djimon Hounsou se paie même le luxe suprême de jouer à la fois dans chacun des deux films.
Mais cet original Captain Marvel connait aussi une autre confusion, avec un personnage de chez DC cette fois, et non des moindre puisqu'il s'agit de Superman. C'est chez une défunte maison d'édition, Fawcett Comics que nait Captain Marvel. Imaginé par le scénariste Bill Parker et le dessinateur C. C. Beck, Captain Marvel s’inscrit dans la lignée de Superman, né deux ans auparavant. Il lui emprunte d’ailleurs sa posture sur la couverture du magazine: vêtu d’un justaucorps rouge orné d’un éclair, il soulève comme l’homme d’acier une voiture. Dès 1948 il est fait état d'un procès pour plagiat opposant DC contre Fawcett, l'éditeur de Captain Marvel à qui l'on reproche de trop ressembler à Superman. Cela conduira à la chute de Fawcet et DC récupèrera le plus puissant mortel du monde sous son égide. Il ne saura trop quoi faire de ce personnage tellement singulier, et Marvel intentera à son tour un procès à DC, car dans l'entre temps, la firme de Stan Lee a récupéré le nom du personnage, alors libre de droit, pour en faire une de leur série phare. Cette querelle judiciaire fut une affaire de plus longue haleine puisque j'ai récemment appris qu'elle ne s'était soldée que récemment en 2012, où après des décennies d'affrontement et de confusion, le responsable de la création de DC, Geoff Johns, renomme officiellement Captain Marvel en Shazam.
Voilà la raison pour laquelle mon original Captain Marvel n'est plus connu aujourd'hui que sous son titre de Shazam. Il ne manquerait plus alors que l'application à succès de recherche musicale s'y mette pour qu'un nouvel épisode judiciaire prenne le relais.
II. Le plus puissant Mortel sur Terre
Le nom de Captain Marvel n'est jamais prononcé dans le film de David F. Sandberg. Plus fort, l'argument de son nom devient une espèce de running gag tout au long du film, puisque en tant que spécialiste de la question des super-héros, Freddy, l'ami de Billy, membre lui-aussi de la famille d'accueil dans laquelle on l'a placé, lance régulièrement des propositions afin de baptiser l'alter-égo super-héroïque. C'est une des trouvailles du film : puisque cet humour camp est difficilement transposable en l'état, il fallait donner à ce personnage un aspect humoristique bon enfant. Son humour est en totale contradiction avec celui de Dead Pool par exemple, avec lequel on a tendance à le rapprocher justement d'un point de vue filmique. Rien n'est moins faux. Si l'humour de Dead Pool se décline également sur plusieurs degré, il se distingue par deux caractéristiques importantes : d'une part le héros est capable de tuer les vilains sans remords, et d'autre part, il rompt le quatrième mur théâtral en s'adressant aux spectateurs, ou aux lecteurs dans le comics. Captain Marvel est l'anti-thèse de cette forme d'humour, puisqu'il joue sur un registre plus potache, très bon enfant. Comme dans le comics, il s'adresse autant aux enfants qu'aux adultes qui ont conservé leur âme juvénile. Certes, la noirceur est présente et il y est question de morts. Mais les victimes sont des hommes d'affaires, dont on peux imaginer qu'ils ne sont pas totalement innocents.
Le traitement de l'humour dans le film, et c'est assez rare pour être souligné, ne détourne jamais l'attention du spectateur de l'action, comme c'est malheureusement le cas chez les films Marvel les plus récents. Il en conserve tous les enjeux, tout en conservant beaucoup de rythme au niveau des dialogues. Concernant les situations, même si l'essentiel repose sur les situations reflétant le décalage d'un ado dans le corps d'un adulte, j'ai bien sur beaucoup apprécié les blagues concernant les tests d'aptitude aux différents pouvoirs qui reviennent de façon récurrente.
J'ai également trouvé que David F. Sandberg proposait des cadrages inédits au niveau des plans concernant les personnages en train de voler. Rarement, et depuis longtemps, je n'avais eu le sentiment de voir des hommes réellement voler. Cela vient s'ajouter à la qualité des effets spéciaux que j'ai trouvé globalement de très haute tenue. Un bémol cependant : j'aurai voulu voir les entités représentants les 7 péchés capitaux plus marqués, plus reconnaissables. J'ai guetté les signes tout le long du film, et n'en ai repéré malheureusement qu'un seul : la bouche énorme de gloutonnerie de ce qui semblait être "Gourmandise".
Enfin, et c'est assez notable pour que je le souligne, Sandberg se donne le temps nécessaire pour son récit. Je pense qu'il n'a vraisemblablement eu aucune contrainte de temps, ni aucune coupe exigé par des tiers en postproduction. Cela lui permet de mettre en place une exposition de ses personnages très efficace au début du film, De multiples scènes sont à ralonge, comme le combat final par exemple, sans pour autant que le sentiment de longueur n'apparaisse superflu.
Le thème principal du film est celui de la famille. Tout d'abord, il y a cette famille reniée par le grand méchant qui débute le film. Sa démarche va à l'encontre de son antagoniste, Billy Batson, qui est dans une démarche de recherche désespérée de sa famille. A travers eux, le film pose la question : qu'est-ce qui fait une véritable famille ? Quelles sont les valeurs qui la constituent ? La famille de sang renie les deux personnages principaux. L'enjeu principal de la quête de la mère finit par trouver un dénouement surprenant, mais Billy va plus loin en expérimentant la notion de famille recomposée. S'il commence par la rejeter au début, ce sont les valeurs d'entraide, de solidarité et finalement d'amour, qui finiront par souder cette surprenante famille.
Cet aspect est renforcé par l'ambiance générale du film, qui se situe durant la période de Noël, fête de la famille par excellence. Le personnage du Père Noël présent sur le marché de Noël est là pour rappeler le comique de la situation. Pour autant, le scénario ne veut pas être un conte de Noël, puisque comme on le verra plus loin, la notion de mort est tout de même présente dans cet univers. De la même façon, à l'exemple de Spider-Man qui exploite d'abord ses pouvoirs dans le but de gagner de l'argent en faisant des matchs de catch, Captain Marvel se donne en représentation en jouant le célèbre thème de RockyIII. Respectant les passages obligés, le nouveau super-héros apprends à ses dépend la grande leçon, immortalisé par l'Oncle Ben : "Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités".
III. La démythification du genre
La démytification du genre super-héroïque s'accompagne à mon avis de la tendance à rajouter des scènes humoristiques, souvent à base de Punchline, sur l'ensemble des séquences. J'ai observé ce virage depuis "Thor: Ragnarok". Le film est symbolique dans la mesure où il permet de mesurer l'écart existant avec le premier film Thor réalisé par le grand Kenneth Brannagh. J'ai eu au départ beaucoup de difficultés à voir certaines séquences dramatiques gâchées par un humour malvenu et intempestif, qui, de plus, ne respectait pas celui du Comic original. Cette tendance actuelle, liée avec le succès de Deadpool avec lequel, je le répète, toute comparaison est inopportune, me faisait craindre de voir en Captain Marvel une sorte de parodie ratée, mettant en scène une espèce de Superman comique. Non, un super-héros n'est pas un comique qui balance des blagues dans un one-man show.
Je dois reconnaître que mes craintes au sujet du film concernèrent tout d'abord le casting : ce n'était pas mon choix initial. J'ai, en effet, toujours tendance à juger en fonction du degré de rapprochement avec l'identité visuelle du personnage. Cela est d'autant plus vrai pour un personnage de BD, qui à la différence d'un roman dans lequel nous nous faisons en tant que lecteur notre propre représentation mentale, nous bénéficions de dessins plus ou moins réalistes. Dès mon plus jeune âge, je me suis représenté Captain Marvel sous les traits du grand Rudolph Valentino. Il faut dire que les traits caractéristiques de son visage se sont transmis de façon assez fidèle de dessinateurs en dessinateurs : yeux fins, mis-clos, qui ne s'ouvrent que rarement, mâchoire carrée avec fossette, fossettes aux joues, qui sont également une caractéristique de Billy Batson, et cheveux gominés. Par ailleurs, je suis un admirateur inconditionnel du grand Alex Ross : cet illustrateur de romans graphique travaille avec de véritables modèles humains, dont il dévoile parfois l'identité véritable. Ce qui fait que son Superman et sa Wonder-Woman, que je trouve tous deux fascinants de beauté et de charisme, existent réellement dans la vie de tous les jours. Quelle ne fut pas ma stupeur, lorsque dans son célèbre album "Kingdom Come", qui mettait en scène Captain Marvel, il révèle l'identité de son modèle humain : Sal Abbinanti.
Pour moi, Abbinanti fut une révélation. Il était assurément plus convaincant d'un point de vue physique que Zachary Levy. Force est pourtant de constater, après avoir vu sa prestation dans le film, que l'acteur réussit une belle prouesse. La gageure était de taille : il faut rendre crédible non seulement le fait qu'il s'agit d'un ado coincé dans le corps d'un adulte, mais également qu'il s'agit de la même personne que l'acteur incarnant Billy Batson. Si la ressemblance est flagrante autant que facile dans un comics, elle l'est moins pour un film, à moins d'avoir recours à des effets visuels qui permettent à un seul acteur d'incarner les deux personnages. Cette ressemblance doit se ressentir également d'un point de vue psychologique. Sur ce point, dès la scène d'exposition du personnage, le jeune Asher Angel qui incarne Billy Batson, propose un personnage présenté comme quelqu'un de malin puisqu'il est montré son stratagème ingénieux pour piéger des policiers. Il est guidé d'un point de vue émotionnel par ses difficultés affectives que traduisent la quête de sa mère, et ses problématiques d'intégration dans les familles d'accueil. Tout cela semble s'effacer lorsque Zachary Levy prends le relais du personnage en Captain Marvel, au profit d'une attitude puérile et potache. En effet, on peut être surpris que les préoccupations du personnage deviennent alors d'entrer dans un club pour adulte ou de s'empiffrer de bonbons au supermarché du coin. Si cela ne semble pas perturber Freddy, cela peut paraitre au début déstabilisant pour le spectateur. J'imagine que les scènes avec le jeune Asher Angel ont pu être tournés en premier, et que le réalisateur a du faire faire au mieux afin d'assurer le lien avec le jeu de Zachary Levy. Quoiqu'il en soit, j'ai pu constater autour de moi que le jeu de l'acteur ne faisait pas l'unanimité sur la durée. Mon amie l'a trouvé excessif par moments. Pour ma part, je continue de penser que la gageure est réussie. Malgré les craintes que j'avais au préalable, je n'ai jamais trouvé l'acteur trop excessif : il réussit à conserver à mon avis une tonalité de jeu assez juste, trouvant un équilibre difficile entre le "trop" et le "pas assez". Evidement, je pense ici aux illustres acteurs qui se sont essayés avant lui à ce registre délicat qui consiste à incarner de façon crédible un enfant dans un corps d'un adulte, sans pour autant tomber dans la caricature. Tom Hanks est excellent dans "Big", et j'ai noté un petit clin d'oeil à son personnage dans le film lorsque le méchant marche sur le piano géant dans le magasin de jouet, Robin Williams bouleversant dans "Jack" et, dans une certaine mesure, dans "Hook". Jim Carrey dans la majorité de ses films, en particulier ceux des frères Farelli, et plus récemment Dwayne Johnson, alias "The Rock", dans le remake de "Jumanji". Ce dernier exemple est intéressant si l'on songe que l'acteur fut un temps présenti pour incarner Captain Marvel, et que son nom figure toujours au générique de fin sous la rubrique "Producteur". L'acteur ne souhaitait vraisemblablement pas réitérer deux fois consécutive cet exercice de jeu particulier, mais est donc resté parti prenante du projet. Devant le succès du film, il est question que l'acteur endosse tout de même le fameux collant dans une suite, en incarnant Black Adam, l'alternative maléfique de Captain Marvel.
Enfin, rappelons que Zachary Levy a joué le rôle de Fandral dans "Thor: Ragnarok", et que depuis, il déclarait ouvertement que son rêve était d'interpréter un jour un super-héros. Il y a donc une sorte de mise en abime dans le fait de nous placer, en tant que spectateur, en train d'observer une histoire d'un enfant qui se transforme en super-héros de rêve joué par un acteur qui réalise son rêve d'incarner un super-héros.
Le reste du casting est également impeccable, en particulier Mark Strong dans le rôle du Dr Sivana. Grace à son interprétation, le grand méchant du film est vraiment réussi : il est charismatique, iconique. Je me plais à penser qu'il aurait également pu incarner un excellent Lex Luthor. Les membres de la famille, et Freddy en particulier, sont tous attachants et tiennent parfaitement leur rôle. Certains ont critiqué les clichés : le geek obligatoirement asiatique, le gros obligatoirement un looser mauvais en classe et la petite black obligatoirement adorable. Je ne pense pas qu'il faille en tenir rigueur au film, qui suit peu ou prou les refontes de The New 51. La réécriture contemporaine, connue sous le terme New 51 puisque l'entreprise ne concerne que 51 titres, dirige Captain Marvel vers une univers un peu plus crédible qu'il ne l'était à son origine. Même si cela est loin d'être ma préférence au niveau du Comic, je dois bien reconnaître que l'effet fonctionne très bien dans le film. J'ai toutefois été surpris par quelques ajouts, notamment par le fait qu'à ma connaissance, Captain Marvel ne peut pas lancer d'éclairs Le réalisateur a tout de même malicieusement glissé quelques références à la famille Marvel, qui est tout de même différente de celle que l'on voit à la fin du film. Ainsi, le tigre en peluche que tente de gagner la mère de Billy Batson à la fête foraine, reprends exactement la physionomie du tigre Marvel.
David F. Sandberg joue de manière ingénieuse de cet aspect "réaliste. En effet, il situe son action dans une ville bien réelle : Philadelphie. A coté du célèbre film qui porte son nom, le beau Philadelphia" de Jonathan Demme avec Tom Hanks, je veux ici surtout retenir la vision réaliste de cette ville proposée par Sylvester Stalonne, en particulier dans "Rocky Balboa", véritable fable humaniste. "Shazam!" multiplie les références à Rocky, avec la scène de l'escalier de la ville que gravit le célèbre boxeur mais aussi avec le spectacle que Captain Marvel y donne sur les marches, jouant le thème "Eyes of the Tiger" de "Rocky III" tout en lançant des éclairs avec ses mains. Cette volonté de s'ancrer dans le Réel peut quelquefois néanmoins desservir le film, en faisant passer Zachary Levy pour un acteur portant un costume de Cosplay, puisqu'il est très souvent montré, du moins au début du film, marcher avec Fredy sans trop faire état de ses capacités hors normes.
De la même façon, ce réalisme est battu en brèche dès le début du film, où le réalisateur choisit délibérément de situer son action dans un monde dans lequel les super-héros existent. J'ai été très surpris de voir les multiples allusions à Superman, Batman ou encore Aquaman. Dès le début, la caractérisation du personnage de Freddie s'appuie sur le fait qu'il soit un spécialiste de la question. Il a ainsi un véritable Battarang, qui se révèlera par la suite très utile, et surtout possède des balles qui ont ricoché sur Superman. Ce trait peut s'expliquer de deux façons : premièrement, le film "Shazam!" s'inscrit dans l'univers cinématographique de DC. Mais Sandberg va décidément plus loin, car il propose de belles idées de mise en scène qui en disent long sur l'état de cet univers actuellement :
- le cas Superman : L'apparition de Superman a la fin du film a du certainement déstabiliser et surprendre certains, car il apparait sans que l'on puisse voir son visage. Ce Superman décapité reflète la situation de désertion d'Henri Cavill, qui a annoncé récemment abandonner le rôle, qui pourtant a contribué plus que largement à sa popularité. Sandberg a choisi de conserver cette séquence, dispensable en réalité, afin de mieux souligner cette désertion.
- J'ai beaucoup apprécié la séquence montrant un enfant en train de jouer avec deux figurines : Batman et Superman. En voyant passer Captain Marvel à sa fenêtre, l'enfant fait s'entrechoquer les deux figurines ensembles, avant qu'un deuxième plan de caméra nous les montre toutes deux chutant au sol. Ces plans sont évidement présents pour souligner la chute des idoles, Ben Affleck ayant fait part lui-aussi à son tour de sa décision d'abandonner son rôle de Bruce Wayne. Ce faisant, on peut voir l'univers DC s'effondrer littéralement à l'image de ses figurines, afin de trouver une espérance de renouvellement dans ce personnage de Captain Marvel.
Conclusion
Le film m'a très agréablement surpris, et ce personnage cher à mon coeur trouve ici une belle adaptation. Le film retranscrit à merveille ce côté décalé du personnage avec beaucoup de fraicheur et de générosité. Il s'inscrit dans la place cinématographique qui manquait au panthéon du genre, celle qui parle à notre âme d'enfant qui secrètement ou non, avons tous rêvé un jour d'être un super-héros. La bande annonce ne révèle pas toute la générosité et la fraicheur du film, porté par des interprètes convaincants. La qualité de cette relecture, comme je l'ai dit plus haut qu'elle provienne peu ou prou de The New 51, est comparable en terme d'efficacité et d'intelligence à celle que Marvel a fait sur Ant-Man. L'humour y est simple et frais, et cela en fait un véritable film familial, autour des valeurs de la famille, qui s'adresse en secret à l'enfant qui sommeille toujours en chacun de nous. Au final, si Captain Marvel reste mon super-héros préféré, c'est aussi parce qu'une partie de moi aurait rêvé d'en faire l'adaptation. En qualité de spectateur plus exigeant que la moyenne pour ce film, force est pour moi de reconnaitre qu'il s'agit là d'une franche réussite, et que le film, tout comme la B.D. en somme, porte en lui la capacité rare à distiller de la bonne humeur dans le coeur de ses spectateurs.
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